Virginie
VIRGINIE, jeune fille romaine dont Appius Claudius, l'un des décemvirs, devint passionnément amoureux. Pour en jouir plus facilement il ordonna qu'elle serait remise à Marcus – Claudius, avec lequel il s'entendait, jusqu'à ce que Virginius son père fût de retour de l'armée. Ce vieillard, ayant été averti de la violence qu'on voulait faire à sa fille, vint à la hâte à Rome, et demanda à la voir. On le lui permit ; alors ayant tiré Virginie à part, il prit un couteau qu'il rencontra sur la boutique d'un boucher : "Ma chère Virginie, lui dit-il, voilà enfin tout ce qui me reste pour te conserver à l'honneur et à la liberté !" Il lui porte à l'instant le couteau dans le cœur et la laisse expirante, action atroce mais qui prouve le prix de la pudeur et de la continence, même chez les païens. Il s'échappe de la multitude et vole dans le camp avec 400 hommes qui l'avaient suivi. Les troupes, plus indignées contre le ravisseur que contre le père, prirent les armes, et marchèrent à Rome, où elles se saisirent du Mont Aventin. Tout le peuple, soulevé contre Appius, le fit mettre en prison où il se tua pour prévenir l'arrêt de sa mort. Spurius Opius, autre décemvir qui était à Rome, et qui avait toléré le jugement tyrannique de son collègue, se donna la mort et Marcus –Claudius, confident d'Appius, fut condamné au dernier supplice. Ce crime fit abolir les décemvirs, l'an 449 avant J.-C. Virginie a fourni le sujet d'une tragédie à Mairet (1628), à Leclerc (1645), à Campistron ( 1683), à La Baumelle, à Chabanon (1769), à Laharpe (1786), à Leblanc de Guillet (1786) et à M. Guiraud (1827). Alfiéri, Lessing et Knowles ont traité le même sujet. La mort de Virginie est le sujet d'un excellent tableau, qui fut le morceau de réception de Doyen à l'académie.