Marquise de SOUZA
SOUZA (Adélaïde-Marie-Emilie FILLEUL, comtesse de FLAHAUT, puis marquise de), femme auteur française, née le 14 mai 1761 à Paris, morte le 16 avril 1836. Orpheline dès ses premières années et élevée au couvent, elle épousa, fort jeune encore, le comte de Flahaut qui avait cinquante-sept ans. A la suite des massacres de septembre elle émigra et son mari périt sur l'échafaud en 1793. Elle séjourna en Allemagne, en Angleterre, en Suisse, à Hambourg, rentra en France sous le Consulat et épousa le marquis de Souza en 1802. Ceux qui la connurent trouvaient en elle, selon Sainte-Beuve, "une convenance suprême, un tour d'expression net et défini, un arrangement de pensées ingénieux et simple, du trait sans prétention." Par son talent, ses goûts, son esprit, elle se rattachait au XVIIIe siècle, dont la peinture fait le fond même de ses meilleurs romans. "Ces jolis romans, dit M. -J. Chénier, n'offrent pas, il est vrai, le développement des grandes passions, ni l'étude approfondie des travers de l'espèce humaine ; on est sûr au moins d'y trouver partout des aperçus très fins sur la société, des tableaux vrais et bien terminés, un style orné avec mesure, la correction d'un bon livre et l'aisance d'une conversation fleurie… l'esprit qui ne dit rien de vulgaire et le goût qui ne dit rien de trop." Le premier de ses ouvrages, Adèle de Sénanges (Londres, 1794, in-8), se déroule entre trois personnages, une jeune fille qui sort du couvent, un beau lord élégant et sentimental, un très vieux mari, bon et jamais ridicule ; des causeries, des scènes de parc et de jardin, la gaieté, les caprices et l'aimable sensibilité d'Adèle remplissent le livre ; la situation, fort difficile, est menée jusqu'à la fin en même temps avec aisance et noblesse, sans rien qui soit indélicat, pas un mot ne rompt l'harmonie. Charles et Marie (1801, in-12) est un petit roman dans le genre de miss Burney, gracieux et touchant, avec les paysages, les mœurs et les ridicules de l'Angleterre. Dans Eugène de Rothelin, (1808, 2 vol. in-12), que les critiques mettent au-dessus d'Adèle de Sénanges, la donnée est moins personnelle, le cadre plus vulgaire ; mais l'observation du monde est plus approfondie, la composition plus puissante, l'art plus accompli, la peinture moins jeune et d'une touche moins primesautière. Eugénie et Mathilde (1811) offre un tableau frappant de la nature du Nord, des rivages de Hollande, des rades de la Baltique, avec une action qui représente les sentiments, les tristesses et les joies des émigrés. On cite encore : Emilie et Adolphe (1799, 3 vol. in-12) ; Mademoiselle de Tournon (1820, 2 vol. in-12) ; la Comtesse de Fargy (1823, in-12) ; la Duchesse de Guise (1831, in-8). Mme de Souza a publié ses Œuvres complètes, après les avoir revues et corrigées (Paris, 1821-1822, 6 vol. in-8 ou 12 vol. in-12). On a aussi ses Œuvres choisies dans la Bibliothèque Charpentier (Paris, 1840, 1845, in-12).