Madame de SAINT-BALMONT.
BALMONT (Alberte-Barbe d’ERNECOURT ) connue sous le nom de Madame de SAINT-) , naquit le 14 mai 1607, à Neuville en Verdunois, d’une famille aussi ancienne qu’illustre. Elle avait reçu de la nature les dispositions les pus heureuses pour le métier de la guerre, un corps robuste et propre à tous les exercices militaires, un courage intrépide, une imagination féconde en stratagèmes, une prudence singulière, etc. Elle fit du lieu de sa naissance, qui n’était d’abord qu’un médiocre village, une place d’armes, où elle reçut et protégea contre les Cravates, espèce de maraudeurs, qui ravageaient alors la Lorraine et la Champagne, une foule de laboureurs et d’artisans. Ces troupes indisciplinées, amenées du fond de la Hongrie, commettaient des excès atroces et inouïs, même dans les Pays-Bas Autrichiens, soumis à l’allié de leur maître ; la province de Luxembourg en fut presque entièrement dépeuplée. La Vie de cette femme célèbre, en qui la piété relevait l’éclat des vertus guerrières, et qu’une maladie cruelle enleva le 22 mai 1660, fut d’abord publiée à Paris en 1678, sous le titre de l’Amazone Chrétienne, par le P. Jean-Marie, religieux du tiers ordre de Saint-François. Pour donner une idée de la bravoure nous rapporterons l’exploit suivant : « le premier jour de mai 1636, temps où Madame de Saint-Balmont n’était pas encore bien connue des troupes françaises, 100 cavaliers de la compagnie de Brissac et de celle du baron de Guitaut, vinrent enlever son troupeau de vaches. Aussitôt elle en est avertie par une sentinelle, postée au haut du clocher de la paroisse ; et la voilà en campagne, à la tête de quelques gentilshommes et de ceux de ses paysans qui composaient son infanterie. Les ennemis se présentent au nombre de 60, tandis que les autres emmènent le troupeau. Elle vole à ces derniers, après avoir commandé à son infanterie de faire face aux 60 ; mais cette infanterie, qui n’était pas encore dressée, se resserre au lieu de s’étendre, et se laisse envelopper. L’amazone s’en aperçoit et revole pour la dégager. Elle ordonne à son beau-frère, le chevalier d’Araucourt, et à un autre officier, de percer la cavalerie ennemie ; mais ils sont faits tous deux prisonniers. Alors sa vigueur et son courage redoublent ; et, malgré cinq coups de feu, dont un lui enleva son chapeau (l’auteur remarque qu’en temps de paix même, elle avait, sous un habit de femme, un pourpoint, un baudrier et des bottes) et les quatre autres portèrent de façon qu’elle s’en ressentait encore longtemps après, elle pénètre jusqu’à ses pauvres fantassins, qui étaient prêts à mettre bas les armes. Courage, leur crie-t-elle, ne craignez rien ; nous sommes plus forts que nos ennemis, ils n’ont que des pistolets. Ses soldats ranimés, elle les met en ordre, les range le long d’une haie, qui les couvre parfaitement, après qu’elle leur a fait mettre un genou en terre ; et dans cette posture, elle leur défend de tirer, à moins que l’ennemi ne s’avance assez près pour qu’aucun coup ne soit perdu. En un moment la scène change, et les 60 cavaliers effrayés de la bonne contenance de ces paysans, se débandent, laissent leurs deux prisonniers et prennent la fuite. Pendant ce temps-là, Manheuse (habile et brave officier, qui avait été longtemps capitaine dans le régiment du mari de madame de Saint-Balmont), secondé seulement de 15 fantassins, tenait en respect les 40 autres cavaliers, chargés du soin d’emmener les vaches. L’amazone paraît : les vaches restent et l’on ne voit plus d’ennemis. Personne ne périt dans cette occasion, et il n’y eut de blessés que notre héroïne, et un de ses officiers ; mais les blessures n’étaient pas dangereuses.